Lavalou Jean-Marie : Historique de la Laiterie, Beurrerie, Fromagerie du Bourg-Saint-Léonard (Orne 61).

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FROMAGERIE LAVALOU JEAN-MARIE, LE BOURG SAINT-LÉONARD [61 M]

Jean-Marie Lavalou, est né en 1864, à Guimaëc, dans le Finistère.
Il fera ses études d’agriculture à l’Institut Agricole du Grand-Jouan, à Nozay, en Loire-Atlantique. Selon les époques, cette école changera de nom à plusieurs reprises avant de déménager à Rennes vers 1894/1896, pour devenir aujourd’hui « L’Ecole Nationale Supérieure d’Agronomie de Rennes (E.N.S.A.R.). En août 1886, âgé de 22 ans, Jean-Marie Lavalou va  écrire un article intitulé « Une Industrie Lucrative » qui sera publié par la Chronique Agricole de Bretagne. À la fin de ses études, avec le titre de « stagiaire agréé » en poche, il est chargé par son école de deux missions : L’une en Irlande, et l’autre en Normandie.

C’est ainsi qu’en 1887, il visite le Domaine du Tremblay, à La Goulafrière dans l‘Eure, propriété de Léonce Abaye. (Ce dernier était absent lors de la visite du jeune stagiaire). Il y consacrera quatre pages de son enquête à cette beurrerie-fromagerie. Le contact est estimé très bon par les deux parties, puisque trois ans plus tard, en 1890, Jean-Marie  Lavalou est embauché au Domaine du Tremblay, comme responsable du contrôle des fabrications, de la comptabilité, du paiement du lait aux agriculteurs et du règlement des salaires des employés et ouvriers du Domaine. Il fait partie malgré son jeune âge du personnel d’encadrement. Son supérieur hiérarchique est alors Monsieur Antoine Alba. Le jeune stagiaire acquiert de l’expérience et devient peu à peu un vrai professionnel de cette industrie laitière émergente.

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Dans son livre « Fromages et Fromagers de Normandie », M. Mackiewicz affirme qu’un différend va opposer Jean-Maris Lavalou à son supérieur, Monsieur Antoine Alba. C’est la raison pour laquelle vers 1893, Monsieur Lavalou va quitter la fromagerie du Tremblay pour rejoindre le Comte Constant de Forceville (1857-1895), un châtelain du Bourg-Saint-Léonard dans l’Orne, passionné de laiterie, mais dépourvu de toutes connaissances techniques en la matière.

C’est ainsi que le comte de Forceville va investir beaucoup d’argent dans une grande et importante usine pour l ‘époque, en s’appuyant sur le savoir-faire de M. Lavalou. L’espace autour du château ne manque pas. Celui-ci est agrémenté d’un grand parc et d’un étang, ce n'est pas la petite maison dans la prairie. (Voir les photos qui parlent d’elles-mêmes).

La fromagerie construite comprend un atelier de fabrication, un hangar, des hâloirs, une chaufferie en brique, un magasin industriel, un transformateur, et une grande cour. On y trouve aussi des écuries et plusieurs porcheries comme dans toutes les fromageries de l’époque. La capacité de production est estimée à 6000 camemberts par jour, quantité non négligeable en ce début du 20ème siècle. Cependant, le démarrage est lent à cause de la matière première, qui est loin d’être abondante à cette époque. Le lait était ramassé dans toutes les communes environnantes à 4 et 5 lieues à la ronde, à l’aide d’une dizaine de voitures. Les fromages et les beurres de l’usine étaient expédiés quotidiennement à partir de la gare d’Almenèches. Les produits Forceville-Lavalou sont de bonne qualité, et commencent à se forger une bonne réputation. Pour preuve, dès 1894, la fromagerie commence à remporter des concours agricoles et décroche diplômes, médailles et autres récompenses. En voici quelques exemples connus: Concours Agricoles de Caen et de Bordeaux 1894, médaille d’Or.  Concours de Reims 1895, médaille d’or, Concours Agricole de Paris, 1897, médaille de bronze, 1904 et 1908 médaille d’argent, pour le camembert. (Voit tableau) :

Les Récompenses au Concours Général Agricole de Paris : Médaille d’Or pour son Beurre extra fin, Paris : 1905, Médailles d’Argent pour son Beurre extra fin, Paris : 1904,1908, Médaille d’Argent pour son Beurre pasteurisé, Paris : 1975, Médaille de Bronze pour son Beurre pasteurisé, Paris : 1972, Médaille d’Argent pour sa Crème crue, Paris : 1974, Médailles de Bronze pour sa Crème crue, Paris : 1972,76, Médailles d’Or pour son Camembert, Paris : 1900,1905, Médailles d’Argent pour son Camembert, Paris : 1904,1908, Médaille de Bronze pour son Camembert, Paris : 1897.

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En 1895, Jean-Marie Lavalou épouse une Brestoise avec qui il aura trois enfants: Pierre (1897-1981), Jean et Madeleine. Mais le 04 septembre de cette même année, le comte Constant de Forceville décède prématurément à l'âge de 38 ans. Son épouse, la comtesse Henriette de Forcevile qui est aussi l’héritière de ses biens, ne mettra pas longtemps l’entreprise en danger, et va confier la fromagerie à Jean-Marie Lavalou en location-Gérence. L’acte sera enregistré le 14 novembre 1895, à l’étude de Maître Laurent-Champrosay, notaire au Bourg-Saint-Léonard. Après le décès de Madame de Forceville le 10 juin 1954, à l'âge de 84 ans, sans descendance, ses biens comprenant le château avec son très beau mobilier, les 425 hectares de terres et de bois, ainsi que la fromagerie, reviendront à la commune du Bourg-Saint-Léonard, qui devient de facto le principal employeur de Monsieur Lavalou ?

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Vers 1916, acquisition d'une deuxième fromagerie par la famille Lavalou à Sérans dans l’Orne. En 1917, des travaux d’agrandissement sont réalisés au Bourg-Saint-Léonard, la laiterie fonctionne avec une machine à vapeur de 15 chevaux. En 1919, la production passera  à environ 2500 tonnes de fromage, et l’usine emploie alors une trentaine d’ouvriers.
Chevalier du Mérite Agricole, élu Maire du Bourg-Saint-Léonard en 1919, ce fils adoptif du pays d’Auge, cet homme droit, honnête et travailleur a toujours conservé la confiance de ses concitoyens jusqu’à sa mort en 1942 à l’âge de 79 ans. Son épouse prendra en charge les affaires, puis ses deux garçons Pierre et Jean vont chacun gérer, l’un la fromagerie du Bourg-Saint-Léonard et l’autre la fromagerie de Sérans. Au début des années 1970, le groupe Besnier rachète les deux fromageries Lavalou, avant de fermer Sérans en 1974, et le Bourg Saint-Léonard en 1980.

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Autres Informations : Journal de l’Orne le 10 février 1942 (Page 2)  NÉCROLOGIE : Nous avons appris avec une douloureuse surprise, la mort de Monsieur Jean Lavalou, industriel, maire du Bourg Saint-Léonard, décédé dans sa 79ème année, après quelques jours de maladie. Le défunt laissera dans sa commune et la région un souvenir durable. Parti d’une condition modeste, M. Jean Lavalou, par son travail et son énergie, et aussi grâce à ses hautes qualités professionnelles, sut acquérir une situation enviable, et donner à son industrie laitière un remarquable essor. Homme droit, d’une scrupuleuse honnêteté, il ne transigera jamais avec ses convictions. Elu maire en 1919, il devait conserver la confiance de ses concitoyens jusqu’à sa mort et se montra administrateur avisé et ami du progrès. C’est grâce à lui notamment que la population fut dotée d’un service d’adduction d’eau. Ennemi de la politique partisane, qu’il jugeait néfaste aux intérêts du Pays, c’est à regret qu’il s’était laissé porter candidat, en 1919, au siège de conseiller d’arrondissement de son canton, qu’il occupa jusqu’en 1931. Il faisait également  partie de la Société d’Agriculture de l’Orne, où ses avis judicieux étaient toujours pris en haute considération. Les obsèques de M. Jean Lavalou ont eu lieu hier jeudi, en présence d’une nombreuse assistance. Dans cette pénible circonstance, nous adressons à Madame Jean Lavalou, à ses enfants et petits-enfants, et à toute la famille, l’expression de notre profonde sympathie et les prions d’agréer nos très vives condoléances.

Serge Schéhadé [pour Camembert-Museum, mai 2014]

Bibliographie : "L'Industrie Laitière en Irlande et en Normandie" par J-M Lavalou (Quimperlé, 1888)  "Fromages et Fromagers de Normandie" par François Mackiewicz (Novembre 1983)

 

 

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Arnaque.....rien de nouveau sous le soleil par Gérard Clouet.

Les messageries sur Internet servent assez régulièrement de vecteur pour une forme d'escroquerie que l'on pourrait appeler « l'arnaque du magot partagé ». Le procédé est simple: on reçoit dans sa boîte aux lettres un message d'une personne inconnue ( une princesse africaine, un homme d'affaire d' un pays quelconque etc....) qui vous confesse être  en but à des vicissitudes ou des tracasseries l' empêchant de disposer d'une fortune qui lui revient ou qu'il a pu dissimuler. Et c'est vous qui êtes choisi  (en raison de vos qualités de cœur bien évidemment) pour aider à débloquer la situation. En contrepartie de quoi, une part conséquente du magot vous est promise.... moyennant une petite aide financière pour aplanir les tout derniers obstacles. Bien entendu celui qui mord à l'hameçon persuadé de faire une bonne affaire, ne voit jamais rien revenir; ni sa mise de fonds, ni la part promise de la fortune qu'on a fait sournoisement miroiter. Et contrairement à ce que le bon sens pourrait laisser croire, il arrive que cela marche. Cette forme d'arnaque n'est cependant pas spécifique du Web.....et elle ne date pas non plus d'hier. Qu'elle n'a pas été notre surprise  - à Michel Lebec et à moi même- en dépouillant les archives de la fromagerie Lavalou du Bourg saint Léonard (61) déposée aux archives Départementales de l'Orne de trouver dans la correspondance  de 1912  une lettre qui était du même tonneau que ce qui a été décrit en préambule.* Jugez-en !

Madrid, le 16-5-912

Monsieur.

Prisonnier ici pour faillite, je viens vous supplier de venir ici lever la saisie de mes bagages en payant au greffe du tribunal les frais de mon procès pour vous emparer d'une valise qui contient un secret dans lequel j'ai caché les pièces indispensables pour retirer une somme de 800 000 francs   que j'ai dans une malle qui se trouve en depôt dans une gare en France. En récompense, je vous céderai le tiers de la somme. Dans la crainte que ma lettre ne vous arrive pas, j'attendrai votre réponse pour signer mon nom et vous confier tout mon secret. Je ne puis pas recevoir votre réponse en prison, mais vous enverrez une dépêche à une personne de confiance qui me la remettra en toute sécurité. Dans l'impatience de votre réponse je ne signe donc que R. Raison majeure télégraphiez n'écrivez pas, est la plus absolue discrétion comme suit : Pedro Canteral . Mondez Alvaro -40- Madrid ( Espana) « tout arrivée » Lavalou.

A n'en pas douter Jean-Marie Lavalou et son épouse qui assurait le suivi de la correspondance ne se sont pas laissés abuser par cette supplique tant ici la manœuvre apparaît grossière. Sources: * Fonds Lavalou 243J AD 61

Date de dernière mise à jour : 04/12/2021