Blanchet Constant (Fromagerie, Dompierre 61)
FROMAGERIE CONSTANT BLANCHET, DOMPIERRE, ORNE 61, par Gérard Clouet.
Constant BLANCHET tourneur en bois ( 1854-1935) et Joséphine Colin tisserande ( 1853-1938) tous deux originaires de Banvou se marient en 1881. Ils s'installent au lieu-dit La Pesnilière à Dompierre où naissent entre 1882 et 1892 leurs quatre filles. Selon les indications recueillies dans l'état civil tous deux continuent à exercer leur profession spécifique au moins jusqu'en 1892 . Ce ne serait donc que vers la fin des années 1890 qu'ils créent une fromagerie puisqu'ils obtiennent dès 1898 une récompense à Marseille puis Toulon en 1899.La même année il est membre du jury à Nice, ce qui pour l'époque représentait un voyage assez considérable pour le petit producteur que devait être encore Constant Blanchet. La première étiquette connue mentionne les noms Colin Blanchet mais sans localisation précise. Cependant il y est fait mention des récompenses évoquées ci-dessus. En 1901 une étiquette à l'effigie de Jeanne d'Arc est déposée par Constant Blanchet. Sur cette étiquette figure la mention ferme de La Pesnilièr-Dompierre. Les récompenses de 1898 et 1899 y sont à nouveau reportées ainsi que l'obtention d'une nouvelle médaille obtenue à Paris en 1900. En 1901 lors du recensement communal, la ferme n'emploie qu'un seul domestique. La construction des hâloirs ainsi qu'une écurie pour héberger les chevaux utilisés à la collecte du lait auprès des agriculteurs des environs doit dater de cette époque .
En 1906 le recensement fait apparaître 3 domestiques et deux laitiers dont Auguste Masseron de Champsecret.
Le premier septembre 1907, une convention orale est passée entre Constant Blanchet et quatre autres fromagers ( Barré,Bigeon, Langlois tous les trois de Champsecret, et Hochet de Saint Bomer les Forges) selon les termes de laquelle ils conviennent « de ne pas prendre de clients, autrement dit de fournisseurs de lait, à leurs confrères, mais à se maintenir dans leur clientèle actuelle sans faire d'incursion dans la clientèle des autres ; qu'ils devaient aussi s'entendre pour faire le même prix aux propriétaires et fermiers, de façon à ce qu'il existât unité de tarif entre les cinq acheteurs ; que ceux-ci s'engageaient d'honneur à respecter ladite convention et que, pour le cas où elle serait enfreinte, chaque contravention devait être passible de 1 000 fr. de dommages-intérêts, qui seraient acquis aux autres parties et partagés respectivement entre celles au mépris du droit desquelles la contravention aurait été commise».*1 Aujourd'hui, les règles de la concurrence ayant évolué, un tel accord serait qualifié d'entente illicite et condamné comme tel.
En octobre 1909 Eugénie Lecellier, la veuve d'Isidore Barré décédé en 1907, porte plainte auprès du tribunal de commerce de Flers contre Constant Blanchet qu'elle accuse de contrevenir aux obligations de la convention orale de 1907 . Elle lui reproche d'avoir de pris les livraisons de trois de ses fournisseurs ( Brodin, Rivrain, Lafontaine), qui s'étaient présentés à lui de leur propre initiative. Le tribunal reconnaît le caractère licite de la convention mais déboute la plaignante des dommages et intérêts auxquels elle prétendait. Elle interjette de ce jugement et le 4 avril 1910, la cour d'appel de Caen rend un jugement qui lui donne gain de cause et condamne Constant Blanchet à lui verser 750 f de dommages et intérêts.*1
Le recensement de 1911 dénombre 6 domestiques employés pour l'exploitation de la ferme et de la fromagerie.
La fille cadette du couple Blanchet, Irma (1885-1973), épouse en 1903 un des employés de la ferme Auguste Favrie né à Céaucé en 1876. Deux enfants naissent, Maurice en 1905 puis Joseph en 1911. Cette même année, 7 domestiques sont recensés dont Auguste Favrie et sa femme Irma, sans aucune précision de profession. Auguste Favrie est mobilisé le 11 août 1914. Il passera successivement du 101ème RI au 30ème RIT puis au 44ème RIT avant d'être démobilisé en janvier 1919. Le couple se sépare en 1921. La production de fromages se poursuit puisqu'une étiquette Favrie-Blanchet est déposée le 30 janvier 1924 au tribunal de commerce de Flers par Auguste Favrie. Mais les activités de la fromagerie vont semble-t-il rapidement connaître des difficultés et s'arrêter probablement peu de temps après.
Aujourd'hui les hâloirs existent toujours et appartiennent à un couple anglais qui les a transformés en gîtes ruraux.
Sources : Etat civil, recensements 1901,1906,1911.
(1) : Plainte veuve Barré contre Blanchet. Cour d'appel de Caen 4 avril 1910. Communication S.Schéhadé 2017.
Gérard Clouet [Camembert-Museum, le 02 novembre 2017]
Date de dernière mise à jour : 09/03/2020