Imprimerie Henri GARNAUD

Marie claude cournede heritiere de limprimerie garnaud a garde en souvenir tout un stock detiquettes de fromage imprimees par son grand pere

IMPRIMERIE HENRI GARNAUD [ANGOULÊME] par Christelle Lassaires (La charente-Libre).

Il y a encore pas si longtemps, la Vache qui Rit se faisait tirer le portrait à Angoulême. Dans l’imprimerie fondée par le grand-père de Marie-Claude Cournède. Henri Garnaud. Un petit ouvrier d’imprimerie né à Angoulême, qui a eu l’idée géniale d’imprimer les étiquettes de fromage. «Il avait fait le calcul qu’il y avait une laiterie et un fromager par canton dans toute la France»

Dans ce pays du fromage, il avait donc parfaitement pressenti ce gros débit d’étiquettes qu’il faudrait fournir chaque jour. Pour le moment, il travaille dans l’imprimerie Veyret dans les actuels locaux d’Appart-City, au Nil. Le soir après le boulot, il fait des «travaux de ville», des cartes de visites dans un local qu’il loue près de l’école Saint-Paul. Puis son directeur le pousse et l’aide même financièrement à s’installer à son compte. Le 21 octobre 1921, à 30 ans, il ouvre son imprimerie à la place d’un commerce de vêtement, place du Palet. Il imprime les cahiers de papiers à cigarettes et ses fameuses étiquettes de fromage. Le commerce prospère rapidement et emploie une trentaine de salariés. Mais Henri Garnaud meurt à 59 ans, d'une crise cardiaque, sur le quai de la gare de Lyon, en revenant d'une cure à Evian.

C'est désormais Berthe, sa femme, qui reprend les rênes. Une femme chef-d'entreprise, la pratique n'est pas si fréquente à l'époque. Mais ses deux fils Claude et Jacques, âgés de 20 et 25 ans, sont trop inexpérimentés. "C'était une femme de caractère qui savait commander avec fermeté et gentillesse", se souvient Marie-Claude Cournède, sa petite fille qui deviendra PDG adjoint quelques années plus tard. Elle est tellement fière de cette grand-mère, dont on parle peu. "Elle voyait loin. Elle tenait par exemple à avoir un stand au SIAL, le salon de l'alimentation à Paris pour trouver de nouveaux clients". C'est elle encore qui, en 1951, déménagera l'imprimerie de la place du Palet, devenue trop petite, vers le quartier de Bellevue, toujours à Angoulême. "Elle a fait construire en même temps les habitations pour toute la famille. Sa maison au milieu de celle de ses deux fils". Elle tiendra les rênes de l'entreprise, presque jusqu'à sa mort en 1965, à 70 ans, laissant la place à Jacques et Claude, qui feront travailler à leurs côtés la troisième et dernière génération Garnaud. L'entreprise familiale emploie 120 personnes et s'agrandit encore en construisant un deuxième local à Voeuil-et-Giget. "Nous étions les leaders des imprimeurs d'étiquettes de fromage". Le nom Garnaud fait référence dans le métier. Sous la plume de Fabien Gruhier, le Nouvel Observateur écrit en 1984 : "Henri Garnaud est à l'imprimerie, ce que Louis Renaud fut à la voiture". Les étiquettes de brie signées Garnaud traversent l'Atlantique, on les trouve dans les supermarchés aux Etats-Unis. Le savoir-faire charentais est reconnu jusqu'en Algérie. "Toutes les étiquettes des huiles Lesieur, des sodas, des produits alimentaires algériens, venaient d'Angoulême aussi".

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En plus des étiquettes de roqueforts et camemberts, la maison imprime aussi les pages couleurs du Larousse, les étiquettes des glaces Findus, Gervais, Miko, le lait Candia, les tickets de la Française des Jeux, des pubs, les enveloppes de la Couronne, des supports pour Rondinaud, et Leroy-Somer... La maison se transforme aussi en studio de dessin et de photos "on créait nous-mêmes les dessins que nous imprimions". Marie-Claude Cournède se rappelle d'une photo censurée d'une femme aux seins nus qu'un client lui avait commandée pour coller sur Fromince, un fromage diététique. On était sous Giscard. "Il a fallu la rhabiller avec un pyjama pour éviter le scandale". Aujourd'hui, tous ces souvenirs sont partis en fumée avec l'incendie de l'usine de Voeuil, ce funeste 1er décembre 1989. Tout a brûlé en une demi-heure. Un incendie accidentel, mais dont l'usine, reconstruite un an plus tard, ne s'est jamais remise. "Il aurait fallu licensier" Marie-Claude Cournède hausse les épaules. ce n'était pas le genre de la maison.

L'entreprise est rachetée en 1997 par Jean-François Vieira, des imprimeries Sopan-Sajic, liquidées à leur tour en 2014. Marie-Claude Cournède regrettera toujours tout ce savoir-faire disparu, qui a permis de sortir jusqu'à 500.000 étiquettes de fromage par mois, 5 milliards d'étiquettes de camembert en 10 ans. Une belle histoire, dont il reste 70 ans d'archives léguées au Musée du Papier d'Angoulême et au Musée de l'Imprimerie de Nantes. Et, toujours le beau sourire de la Vache Qui Rit.

 

 

 

 

 

 

 

 

Date de dernière mise à jour : 20/08/2023